Coucou, chante le coucou, à son ours polaire.
Comme il fait froid ici, dans votre Hiver.
Permettez-moi tout de même de m’assoir
Sur votre banquise, le temps d’une histoire.
Coucou, il est temps de vous réveiller cher ami...
Je m'en vais papouiller votre cœur endormi,
Becqueter vos poils de mon petit bec pointu,
Et ôter ce vêtement pour me mettre à nue.
Oh n’ayez crainte, dans vos bras je n’ai pas froid.
Votre épaisse fourrure agissant sur moi,
Tel un feu brûlant dans le dehors des montagnes
Dans le froid de nos mers, de nos campagnes.
À votre oreille de papier, je vais chanter.
Sur le sable de nos mers, je vais griffonner.
Votre ouïe vous fait défaut cher ami ?
Quelle aubaine pour la petite fille que je suis,
J’ai des lettres de scrabbles plein mon sac,
Il est temps de mettre de l’ordre dans ce vrac.
De vous conter l’histoire de ces fous,
Qui ont banni de leur vocabulaire le mot : jaloux.
Enfin, tout de même, soignez votre cataracte,
S’il vous plait, ne me cassez pas la baraque,
Il serait dommage de ne plus pouvoir me lire...
J’ai des histoires à n’en plus finir.
J’ai enlevé ce vêtement trop grand et inconfortable,
Cette robe de princesse, pour passer à table.
D’ailleurs avec vous, c’est à terre que je mange,
Et dans la grange que je dors, auprès de mon ange.
Vous seriez un objet : “un journal intime”
Sur mon salaire, vous seriez ma prime.
Mais revenons à notre banquise,
Avant que ma mine ne devienne grise.
Quand celui qui faisait chanter tes lendemains,
S'en va sur l'invisible des grands chemins.
Alors le vide sidéral glacial s'engouffre en toi,
Tes jambes deviennent raides, ton corps froid.
Vous savez cher ami, vous qui avez enfilé aussi le costume de tortue,
Profitant de la carapace de celle-ci pour cacher votre cœur ému.
Vous savez ce froid qui s'engouffre, malgré l’épais vêtement
Posé sur votre corps de grand, de géant d'homme/enfant.
Vous savez ce cœur qui devient lettre morte.
À mon tour de ne plus être une femme forte,
Du haut de vos années, vous l'avez expérimenté.
En plus chez vous, la guerre est passée...
Moi je me suis dit : "est-ce que la vie tangue encore ?"
Pas facile à appréhender que madame la mort.
Alors apparaît cet homme : vous, dans le froid de l'hiver.
Vous avez enfilé votre costume d'ours polaire.
À mon grand bonheur, vous n'avez cessé d'être,
Et voilà que nous partageons glaces et crêpes.
Avant vous aviez emprunté celui du canard,
Ensemble nous avions barboté dans la mare,
Sous un joli soleil de printemps.
Mais encore maintenant, en moi la grande enfant
Reste curieuse de la vie et de ses habitants.
Mais comme les mômes je ne comprends pas ces grands,
Qui visiblement vivent dans le mensonge,
Tandis que toi et moi, existons dans nos songes.
Le vieillard que tu es cache son cœur ému,
Sous l'épaisse carapace de la tortue.
Car tu as vu l'horreur, tu as aussi tout bu, tout entendu,
Ce n'est pas un hasard si tes oreilles te font défaut.
Cela t'évite certainement les remontées de trémolo,
Dans le bal d'ego, ça débite tellement à tout-va
Et comme moi tu n'as plus envie d'entendre tout ça.
Moi j'aimerais pouvoir enfiler ta carapace,
Car tu je le sais, les grands sont voraces
Et ma sensibilité d'artiste me fait souffrir,
Il y a même des jours, je préférerais mourir.
J'aimerais enfiler ton costume d'ours polaire,
Pour, sans crainte, partager une bière avec mes congénères.
Tu as l'art et la manière d'embrasser tous mes personnages,
Tu m'évites ainsi le naufrage, moi qui suis chronophage.
Tu revêts tous les âges et sexes confondus,
Tu répares chaque fois mon petit cœur fondu.
Du haut de tes années, tu m'imposes la lenteur,
Tu dis : "profite, il va si vite le temps qui se meurt,
Qui emmène les individus sur l'invisible des chemins",
Mais toi seul, tu peux aussi faire chanter tes lendemains
Et te prendre comme une grande, par la main.
Car tu le sais, un jour le canard ne vibrera plus,
L'ours disparaîtra et le cœur du vieillard ne battra plus.
Tu le sais, tu n'es pas si fragile, tu as en toi ta propre béquille,
Qui empêchera le démon en toi de partir en vrille...
Tu ne pourras combattre tous les dragons et dragonnes,
Tous ceux et celle, qui se font passer pour moines et nonnes,
Tout le monde n'est pas, comme toi, à la déconne.
Mais tu le sais, chacun son temps pour y arriver,
Un jour ou l'autre ils seront rattrapés par ce travail à effectuer,
Ces grands qui ne veulent voir leur propre vérité....
Car toi et moi on les a vu s'accrocher avant de mourir,
Dans cet hôpital, ce grand empire,
Où l'on pousse son dernier soupir.
Moi je te souhaite, mon ours, de mourir
Ailleurs que dans ce grand bâtiment.
Pour l'heure, gardons notre cœur d'enfant
Et profitons de nos petits instants.
Il file si vite le temps, mon géant...
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